En partenariat avec le musée et les archives de l’Arche, elle entame un projet de captation sonore afin de recueillir des témoignages de la population ayant vécue et travaillée au XXème siècle sur l’archipel. L’idée est de saisir les bribes d’un passé révolu afin de conserver la mémoire de ses habitants. Ce qui est recherché, ce sont des faits, des anecdotes, des moments vécus à Saint Pierre-et-Miquelon sur les 80 dernières années. Tous les sujets sont acceptés, la seule contrainte est d’avoir vécu ces épisodes de vie. En contactant la communauté des aînés, en frappant aux portes, en passant de nombreux coups de fil, Yuna Amand tissera un réseau de personnes ouvertes à cet exercice de narration. En allant au contact de cette population, elle façonnera en filigrane, un paysage sociétal. Loin d’être représentative, scientifique et/ou sociologique au sens strict du terme, cette collecte de témoignages met en avant les changements familiaux, professionnels et climatiques de l’archipel de Saint Pierre-et-Miquelon.

Pour créer ce réseau, Yuna Amand s’est absorbée dans la vie des insulaires. Grâce à son séjour d’un an, et aux liens de confiance entretenus avec les habitants, elle a eu accès aux voix de personnes en retrait des médias. En observant la vie professionnelle des uns, le quotidien des autres et en parlant de manière informelle du projet, année après année, elle a fait connaître sa démarche et ses intentions. En priorisant le déplacement vers les habitants, elle a pris le temps de les visiter, de les écouter et d’appréhender leurs lieux de vie. (Qu’il s’agisse de Saint-Pierre, Miquelon ou encore Langlade, elle s’est rendue dans tous les lieux proposés).

Dans ce projet, les thèmes ne sont pas imposés. Chacun a pu parler des sujets qui lui tenaient à cœur. Lors de la prise de contact par téléphone, le projet est présenté comme une discussion sur la vie passée sur l’archipel et son évolution. Les participants sont invités à choisir un ou plusieurs sujets. Un rendez-vous est convenu, et Yuna Amand se rend sur le lieu déterminé. À partir de ce cadre, les gens se lancent dans leurs souvenirs. Si la personne est à même de parler sans relance de question, l’enregistrement commence et se termine lorsqu’elle a fini son récit. Dans d’autres cas, une conversation peut s’engager afin de dynamiser et soutenir le témoignage. Les questions ne sont pas préparées au préalable. Elles interviennent le plus souvent pour éclairer un fait ou encore un terme spécifique.

Lors du montage, les témoignages sont traités dans le respect de leur authenticité. La voix de Yuna Amand est supprimée. Les bafouillements, les sons parasitaires sont retirés ou atténués. Aucun propos lié au récit n’est coupé.

En 2019, deux témoignages voient le jour, puis quatre campagnes sont organisées entre 2022 et 2024. Actuellement, Archipel, comprend près d’une quarantaine de témoignages (plus de 10h d’enregistrement) sur des thèmes aussi divers que l’enfance dans les familles de gardiens de phare, la pêche (petite et grande), la pratique équestre, les métiers disparus, le climat, les tempêtes, les naufrages, les liens avec la population de Terre-Neuve, les jeux d’enfants, ou encore l’insouciance des vacances.

Ces campagnes sonores contribueront à nourrir le fond d’archives numériques du musée de l’Arche et seront diffusées à échelle nationale dans le réseau des archives françaises.

Lien sonore : https://larche.wivi.app/collections/5dd58a63-d1df-4290-88d5-9591c449311f?hl=fr