Un peu de soleil dans l'eau froide
Vues de l’exposition Un peu de soleil dans l’eau froide
Virginie Barré et Eva Taulois, Galerie de Rohan, Landerneau, 2016
Commissariat : Documents d’Artistes Bretagne et Passerelle, Centre d’art contemporain, Brest
Photo : E.T.
Tsukiko, 2009
Résine, tissu, cuir, laine, flotteur, 155 x 100 x 40 cm Les vacances d’avril_, 2016
_vidéo HD couleur sonore, 7min22_ Les petites jambes, 2016
5 paires de bâtons peints, chaussures Un peu de soleil dans l’eau froide, 2016
Sérigraphie de Virginie Barré et Eva Taulois
Photo : E.T._
Les vacances d’avril, 2016
vidéo HD couleur sonore, 7min22
Avec le soutien du Passerelle, Centre d’art contemporain Brest, et Documents d’artistes Bretagne
5 exemplaires + 1 exemplaire d’artiste
Les vacances d’avril, 2016
9 dessins, marqueur et gouache sur papier, 40 x 70 cm
Simone
La piscine
Nature morte aux boules de sable
L’île imaginée
L’ellipse
Jo
MSP
Les vacances d’avril
Le lait des âmes
Photo : E.T.
Etude pour le rêve géométrique 1, 2016
Bambou, toile, 335 x 100 x 20 cm
Maria, 2016
Laine, 200 x 130 x 25 cm
Photo : E.T.
Un peu de soleil dans l’eau froide_, 2016
uvre multiple de Virginie Barré et Eva Taulois
Photo : E.T.
Sérigraphie 5 couleurs
Papier Rivoli 300 gr, 50 x 70 cm, 45 EX + 4EA
Coproduction Passerelle, Centre d’Art Contemporain de Brest et Documents d’Artistes Bretagne
Impression : Edition Anaïck Moriceau_
Un peu de soleil dans l’eau froide, 2016
Sérigraphie de Virginie Barré et Eva Taulois
Quand Eluard dit subir son « désir comme un peu de soleil dans l’eau froide », Virginie Barré et Eva Taulois semblent prendre à rebours l’émoi du poète en faisant de cette citation l’annonce amusée d’un zénith estival venant contaminer des flots bretons réputés plutôt frais. Ou faut-il plutôt y voir une tentative un brin timide bien que déterminée de conjurer un climat sociétal ces temps-ci bien frisquet ?
Il y a certainement un peu des deux dans ce projet partagé par les artistes françaises réunies. À l’évidence, un air de vacances souffle cet été sur la Galerie de Rohan de Landerneau.
S’il fallait qualifier en deux coups de cuillère à pot leur proposition, on pourrait dire qu’elles inondent de couleur cette ancienne boutique de centre-ville. Ce « peu de soleil » se veut un étal de gestes simples, vifs et vivants qui conjugue tonalités et obsessions des deux artistes.
Chez Virginie Barré, la figure de l’enfance, dans sa récurrence, est porteuse d’une vérité nécessaire. Puisque elle est naturellement le creuset d’élection de l’imaginaire, le travail est irrigué par fictions et références cinématographiques, littéraires, populaires qu’elle détourne et mêle à loisir. Les icones que l’artiste ausculte viennent peupler un monde onirique, fantastique, fascinant et fasciné.
À Landerneau, c’est à travers une collection d’objets sculpturaux fruits d’un assemblage aussi élémentaire que poétique (chaussures de plage en plastique flanquées de bâtons peints, colliers surdimensionnés de laine et de bois peint, etc.) que Virginie Barré plante le décor un brin chamanique des pérégrinations ludiques de ses deux petites filles. Figures centrales de son travail ici, celles-ci sont autant ses sujets, ses actrices que ses collaboratrices dans une fiction innocente et chantée. Leur insouciance narratrice devient un prisme d’appréhension d’un monde dans lequel jeux de formes, de rôles, de mots et de dupe deviennent moteurs artistiques.
Sa consœur de circonstances, Eva Taulois, fait quant à elle flotter ses vêtements peints comme autant d’étendards dans l’espace. Kimonos et T-shirts viennent se substituer à la toile pour offrir au visiteur un ballet de formes si familières aux motifs colorés. L’artiste joue avec les références historiques de l’histoire de l’art. On verra volontiers dans son travail des clins d’œil appuyés à la peinture du colorfield américain, du minimalisme suisse et de l’abstraction géométrique, mais aussi au design dans ses fondements historiques, Sonia Delaunay en tête. Et c’est d’ailleurs certainement dans le sillon de cette dernière qu’Eva Taulois opère tout en douceur une critique éclatante d’une histoire picturale parfois bien trop sérieuse. Dans sa générosité formelle, l’artiste revendique le fait que l’expérience de l’art peut se déployer partout, jusque dans la trivialité heureuse d’un simple vêtement pendu.
Quand Virginie Barré égraine les indices de l’imaginaire, Eva Taulois ouvre par l’abstraction colorée des potentialités fictionnelles.
Et l’exposition de dessiner le décor composite d’une fiction à inventer dans la réunion délicate de ces deux approches.
Etienne Bernard, 2016