Ursula
Döbereiner

NEW . 18.07.2024

KOTTI

kotti 1501.1c

Vues de l’exposition collective Trouble in Painting, BBB centre d‘art, Toulouse, 2014

kotti 1501.1c
Dessin numérique, imprimé sur des feuilles A3 et tapissé sur le mur, 2015

Autres œuvres visibles de Katharina Schmidt, Guillaume Durrieu et Kerstin Drechsel

Trouble in painting

Aucune expression visuelle n’est innocente du point de vue de son contexte social, sociétal et politique : elle est plutôt à la fois expression et réflexion d’un rapport à soi et au monde élaboré de manière spécifique. Dans cet esprit, le projet d’exposition trouble in painting explore les possibilités actuelles de la peinture.

Avec l’apparition du tableau à la Renaissance, la peinture introduit un paradigme qui fonde le concept moderne de l’art. La pratique picturale se détourne des tâches appliquées, l’objet tableau se construit, organisé par la perspective et limité par un cadre. Cela fonde l’idée de la charge symbolique d’un ordre figuré et offre un potentiel à la réception discursive de l’art. Les rapports de regard qui voient alors le jour établit des rapports hiérarchiques entre l’image et le spectateur.

Depuis lors, l’histoire de l’art et de la peinture suit son cours, jusque dans la modernité et la modernité tardive, avec pour condition des rapports de sexe bipolaires imposant aux hommes et femmes des rôles différents. Les codes sociaux et esthétiques de la modernité se font encore ressentir aujourd’hui sur l’image de l’artiste, selon laquelle il importe de lutter pour la reconnaissance d’une identité particulièrement originale. Mais ils agissent aussi sur les catégories esthétiques et commerciales relativement à la production et à l’exposition de l’art et de la peinture.

Il est question de notre passé immédiat qui, pas seulement dans le domaine de l’art, est encore majoritairement déterminé par des protagonistes masculins et qui, par un point de vue néocolonial, influence notre conception de nous-mêmes.
Alors que la modernité, au-delà de disposer de valeurs stables, dispose également d’utopies qui semblent réalisables, nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation qui semble incertaine à tous points de vue. L’influence du monde occidental s’est affaiblie, les utopies ont disparu.

Statique en apparence, cette situation peut pourtant être mit en mouvement par le débat actuel sur le genre. C’est surtout Judith Butler qui a démantelé une vision bipolaire, prédominante dans les théories féministes modernes, au profit d’une perspective décrivant l’identité sexuelle de manière plus complexe. Selon Judith Butler, la réalité de genre est une construction qui se forme dans un contexte social, culturel et politique particulier et qui questionne les catégories biologiques de sexe. D’après Judith Butler, personne ne peut se fondre entièrement dans les normes sociales : il en résulte plutôt un jeu entre le genre et la sexualité qui ouvre la possibilité de développer de nouvelles formations ambivalentes.

Toute à l’écoute de cette pensée, l’exposition trouble in painting veut discuter les formes de représentation possibles en peinture. Nous nous demandons comment les déstabilisations évoquées plus haut peuvent être utilisées comme moteur pour créer de nouvelles formes qui, peut-être, ont un caractère plutôt fragile, ouvert, nomade?

De manières très diverses, tou-te-s les artistes invité-e-s se préoccupent individuellement des significations immanentes des médias qu’ils manipulent, dans le contexte de la peinture. Avec des variantes, des priorités différentes, les projets artistiques tournent autour de l’analyse des moyens, du rapport à l’outil, au corps, à

l’espace et d’une narration plus ou moins explicite. Tou(te)s ont en commun, à l’intérieur de leur travail, de tendre vers une sorte de circulation des éléments qui va à l’encontre d’une manière unilatéralement monolithique de voir les choses.

Pour l’exposition trouble in painting, chacun-e élabore sa propre conception de l’exposition. Dans un deuxième temps, chaque concept est superposé avec tous les autres. Cela conduit à un processus collectif dans lequel tous les calques sont discutés : combien de calques sont-ils déposés les uns sur les autres, et dans quel ordre ? Suivant le principe de Photoshop, nous décidons ensemble quels calque doivent apparaître à quel endroit, à quel calque il revient d’être placé au sommet, et où. L’exposition résulte de l’image globale des calques, dans laquelle la conception de l’individu n’apparaît plus que sous forme de fragment.

Katharina Schmidt, 2014


kotti 1501.1c
Superposition numérique de dessins au crayon, 2015

kotti 1501.1c
Animation numérique