Francis
Raynaud

UP . 16.10.2024

La conférence

2021, présentée dans le cadre de la résidence lecture artiste, INHA, Paris

La conférence (un an de lecture soutenue, 2020-2666) ou l’allographisation fantasmée ou l’ekphrasis à la perche

La conférence est un projet vidéo. Il s’agit d’une conférence prenant quelques fois des airs de performance. Les trois protagonistes sont un artiste plasticien en conférence, une actrice et un chanteur (avec une guitare). L’artiste fait une intervention à partir de ses notes de lecture. Il liste les livres qu’il a lus et les quelques idées que lui ont donné ses lectures. Les autres acteurs interviennent de façon lunaire, ironiquement, voir de façon absurde. Les images présentées sur l’écran de projection sont des œuvres fictives, des mises en forme, des listes thymiques des lectures de l’artiste.

Je vais vous faire la lecture d’un journal de lecture. Je n’ai jamais bien su tenir un journal et les quelques dates présentent ici témoignent d’un manque de régularité. J’ai remanié l’originale, fait des coupes et synthétiser un peu les notes, pour essayer de vous faire partager les idées que me donnent mes lectures, des lectures en grappe, comme vous le constaterez. Je note des mots, des phrases, c’est comme ça que je travaille depuis quelque temps, je ne dessine plus ou je dessine autrement. J’ai plusieurs fois pensé lors de mes expositions, que j’étais à la recherche d’une équivalence sentimentale à des impressions douloureuses de lectures, je cherche, en plus d’exposer mon travail, à tapisser secrètement l’environnement des textes que je lis.

La conférence, 2021
Vidéo HD, son, 20 min
Images & montage : La Plage Production
Avec Laure Catherin
Avec le soutien de la Drac Bretagne, du musée des beaux-arts de Rennes, du Frac Bretagne et de la Lecture-artiste.
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Captures écran de la vidéo


Texte de la conférence

Le 08/01/2020, lu :

Cosmos
Ferdydurke
Les Envoûtés
, Bakakaï (Bakakaj) de Witold Gombrowicz
Le lambeau de Phillipe Lançon (c’est un cadeau de noël)
Le gaucho insupportable et La piste de glace de Roberto Bolaño
Ubik de Philip K. Dick et Artistes sans œuvres de Jean-Yves Jouannais Lis :
Pourquoi je n’ai écrit aucun de mes livres de Marcel Bénabou,
Soins intensifs dandy de Claire Guezengar,
Monsieur Pain de Roberto Bolaño.

C’est Boris Achour qui m’a parlé de Gombrowicz, il m’a dit qu’il avait retrouvé un peu de son propre travail dans les livres de Gombrowicz, je le cite, Cosmos, le roman, a été très important pour lui parce qu’il y a trouvé des problématiques qui étaient déjà présentes dans son travail, j’y ai trouvé des échos très fort avec les choses qui m’intéressaient dans mon travail, la notion de fragment, la notion de chaos, la notion d’absence de sens au monde, les signes que l’on suit et qui amènent autre part, énormément de choses, l’aspect érotique, il le voyait presque comme un miroir, avec des liens très forts avec les choses qu’il sentait très fort dans son travail. Je dois dire que moi aussi quelque part. Surtout sur l’informe, les notions de fragments et les histoires de grimaces. Cela m’a donné une idée, une vidéo, dont le sujet est une marionnette en mie de pain, une petite boule de mie de pain, une boule de mie de pain très impressionnante. Le dernier texte du Gaucho insupportable de Roberto Bolaño est aussi très impressionnant. On pourrait facilement coupler deux parties de ces œuvres :
Gombrowicz dans Ferdydurke : Dites-moi votre avis : ne pensez-vous pas que le lecteur n’assimile que des parties et de manières partielles ? Il lit une petite partie, un morceau, puis il s’arrête avant d’aborder le suivant, parfois même il commence par le milieu ou par la fin et va à reculons vers le début…Et Gombrowicz insiste, parties, répétitions, couper, arranger, enlever, recoller… Devons-nous construire un tout pour qu’une parcelle de partie de lecteur absorbe une parcelle de partie de cette œuvre, et encore partiellement ?
Bolaño, sur le ton de l’ironie dans Les Mythes de Cthulhu, nous dit que les auteurs à succès vendent et jouissent de la faveur du public parce que, leurs histoires, on les comprend. La vidéo montre une petite marionnette en mie de pain qui parle et en sautant, déblatère, jusqu’à être coupé, en deux, en trois, en quatre morceaux. On coupe la parole, on coupe un petit bout de mie de pain. Mais sa voix, elle, se dédoublent jusqu’au brouhaha totale et homogène.

Le 28/03/20. Lu (avant confinement) :
Ouestern, Sister sourire, Une pure tragédie de Claire Guezengar Vendredi ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier
Plan d’évasion de Bioy Casares.
Serotonine de Michel Houellebecq
Fin de défilé de Reinaldo Arena

Lis (pendant le confinement) :
Les livres de Claire Guezengar, encore Beloved de Toni Morrison
Complot contre l’Amérique de Philipp Roth. La légende de saint buveur de Jospeh Roth Le maître du haut château de Philip K. Dick

Les livres de Claire Guezengar m’ont beaucoup plus, émus. Les dispositifs sont intelligents et permettent de vivre un instant avec elle. Trois livres et beaucoup de plaisir. Ils ne nous aspirent pas, au contraire même. Ils nous inspirent une mélancolie douceâtre. Alors, j’ai décidé de travailler sur un de ses textes, d’en faire une mise en scène, un petit spectacle. Je venais de lire M. Vertigo de Paul Auster et j’ai trouvé, peut-être par chance, un texte de Claire Guezengar dans le fond qui lui est consacré et qui est conservé aux archives de la critique d’art un texte : retour à l’apesanteur. L’idée m’est venu, presque par elle-même, de travailler sur l’apesanteur, sur la lévitation et sur la magie. Son très beau texte sera joué, lu et incarné par une actrice, Laure, faisant en même temps quelques tours de magie.

(J’ai aussi pensé à une pièce audio, qui serait un peu comme le canular radiophonique d’Orson Wells. Ce serait le témoignage d’une personne, qui, quand elle était enfant, pouvait en quelque sorte voler, ou plutôt léviter. Après tout, de nombreux témoignages attestent de personnes en lévitation, Joseph de Cupertino, le plus célèbre est l’objet d’un très beau texte de Cendrars, Le Lotissement du ciel, ou Daniel Dunglas Home et bien d’autres.)

Le 27/05/20. Lu :
Amerika et Le Procès de Franz Kafka
Nous trois, Les Grandes Blondes, Un an, Je m’en vais, Ravel, Courir, Des éclairs, 14 et Envoyée spéciale de Jean Echenoz
Lis : Je suis vivant, vous êtes morts de Emmanuel Carrère (biographie romancée de Philip K. Dick, lecture éprouvante)
Les gommes de Alain Robbe-Grillet
(Entre les deux, sans date) Lu : Les barrages de sable de Jean-Yves Jouannais

Peut-on imaginer une œuvre avec tout ça ? Oui ! Est-ce facile ? Non ! Mais quelque chose m’a fait penser à mon rapport à l’atelier. L’atelier, c’est quelque chose d’important pour moi. J’y passe beaucoup de temps, et ce temps me semble être différent. L’atelier, pour moi, c’est là où tout se passe et pourtant, il ne se passe pas grand-chose. C’est un endroit de voyage immobile. Pour Villa Matas, par exemple, ce serait plutôt les chambres d’hôtel. Il y a dans le roman de Jean Echenoz, Un An, un personnage que l’on croit mort, mais dont on s’aperçoit qu’il est vivant, et un second personnage qui, inversement, est mort alors qu’on le croit vivant. Il ne voulait pas en faire une suite, mais un contrepoint et ce n’était pas facile à montrer. Or, du mort de la première page, qui apparaît donc vivant à la fin, il n’était dit qu’une seule chose, c’est qu’il partait à l’atelier (…). L’atelier devenait l’élément à partir duquel reconstituer une sorte de faux puzzle (1). Il y a aussi, dans le roman Les gommes de Alain Robbe-Grillet, ce personnage qui tourne en rond dans une ville portuaire, Robbe-Grillet est né à Brest, et qui est en quête de vérité et de la gomme parfaite. J’avais déjà en tête l’idée d’interroger les œuvres qui sont à l’atelier, écouter ce qu’elles racontent, ce qu’elles pensent. J’en ai fait une vidéo, Des avions dans la tête, une vidéo muette de 10 minutes. Des plans filmés de mon atelier et des tours de magie se succèdent. Le texte qui accompagne les images évoque la pensée de l’atelier. Il se demande si des œuvres sans public sont vraiment des œuvres d’art et si les tours de magie sans public sont vraiment magiques.

1 : Echenoz, Jean, JE M’EN VAIS, Les éditions de minuit, Dans l’atelier de l’écrivain, entretien réalisé par Geneviève Winter, Pascaline Griton et Emmanuel Barthélémy, p.231.

Le 20/08/20. Lu :
Journal Volubile de Vila-Matas (dans lequel il y a une très intéressante réflexion sur le devenir auteur, notée plus bas)
Le théorème d’Almodovar
et Enigma de Casas Ros, étrange écrivain. Sur sa fiche Wikipédia, on peut lire qu’à vingt ans, il a été victime d’un accident : sa voiture percute un cerf, sa compagne est tuée sur le coup et lui-même reste défiguré. Suivent alors de longues années d’une vie recluse, qui sont pour lui l’occasion « de traverser la solitude sous toutes ses formes et ses couleurs ». Aujourd’hui, l’expérience de la solitude semble devenue un choix assumé. Il affirme : « Je préfère l’essence à l’image. Même si j’avais un visage, je pense que j’aurais fait le choix de rester isolé. » C’est aussi l’histoire du théorème d’Almodovar.

Lis : Proust : Du côté de chez Swann, que j’ai finalement rangé dans la bibliothèque.
La préparation du roman de Roland Barthe et Journaux (Kafka traduit par Robert Kahn).

Vila-Matas raconte un souvenir. Petit, il est allé voir Vingt Mille Lieues sous les mers au cinéma. Quand il rentre chez lui, sa tante lui demande ce qu’il est allé voir. Vila-Matas, en guise de réponse lui montre son livre, le Vingt Mille Lieues sous les mers de Jules Verne. Suprématie totale de la littérature.
Réflexion sur le devenir auteur, donc, sur Montaigne : Dans son livre inachevé sur Montaigne, Zweig insinue l’existence de plus d’un visage de Montaigne quand il explique que, dans un premier temps, celui-ci écrivit pour lui-même et que ce n’est qu’après la publication des deux premiers volumes de ses Essais qu’il se sentit tout à coup écrivain, raison pour laquelle il projeta son ombre sur les Essais postérieurs : « Tout public est un miroir, dit Zweig, chaque homme se découvre un autre visage quand il se sent observé. À peine les deux premiers volumes ont-ils paru que Montaigne commence de facto à écrire pour les autres, et non plus seulement pour lui-même. Il commence à refondre les Essai.
L’écart entre la réalité physique et la réalité littéraire peut-elle être réifié ? Peut-être sous la forme d’une sculpture informe obtenue grâce à un scanner 3D mobile. Un artiste scanné lors de son trajet de chez lui à son atelier, par exemple ? Ou de son atelier à chez lui ? Ou les deux et on en déduirait le part de création qu’il a laissé à l’atelier ? C’est un projet de sculpture informe, comme le visage de Casas Ros. En voyant la sculpture, le public s’écrirait : suprématie totale de la création.

Le16/11/2020. Lu :
Le Dernier Monde
Faillir être flingué
Bastard Battle
et Bacchantes de Céline Minard
Vie de Gérard Fulmard de Jean Echenoz, pas le meilleur
Malakoff de Gregory Buchert
Lis : Vie et opinions de Tristram Shandy, Laurence Sterne. Vertige total.

Mais commençons par Céline Minard. Ses dispositifs sont époustouflants, on est plus dans une performance que dans un film. Ses livres sont libres et fous, comme l’est d’ailleurs Vie et opinions de Tristram Shandy, de Laurence Sterne, des montagnes qui accouchent de montagnes. Il y aurait trop à dire et je préfère imaginer ces auteurs, Laurence Sterne est né en 1713 et Céline Minard, en 1969, je préfère les imaginer à l’œuvre, pleinement conscient de cette folie et construisant un piège, un labyrinthe. Quand, à la fin du sixième volume de Tristram Shandy, célèbre pour quatre lignes schématisant les livres qui composent le livre qu’on tient entre nos mains et reprisent plusieurs fois par des artistes, tel que Mai-Thu Perret qui en fait une version en néon (Shandy, 2014), se trouve une page blanche sensée décrire la veuve dont l’oncle Tobie tombe amoureux. Je lis : pour vous la bien figurer, -demandez qu’on vous apporte une plume et de l’encre-vous avez ici du papier sous la main (notre fameuse page blanche). Asseyez-vous, Monsieur, et représentez la veuve à votre fantaisie- qu’elle ressemble à votre maîtresse autant que faire se pourra-et aussi peu à votre femme que votre conscience vous le permettra- c’est tout un pour moi- faites simplement comme cela vous chante et pour ne complaire qu’à votre imagination.

Sterne morcelait régulièrement l’expérience de la lecture en en rompant la continuité pour en faire ressortir telle dimension du support physique : structure du texte, de la page, du livre. On est tout proche d’une œuvre conceptuelle. Céline Minard, elle, écrit Bastard Battle dans un vieux français de son cru et narre l’histoire du batard.
L’œuvre que j’imagine avec tout ça, c’est une chanson, une chanson paillarde et raffinée.

Orateurs rateurs
avec la veuve et l’orphelin
Le batârd et sa gangue
on parlait alors de novlangue comme un glaire dans la gorge les faux avis de passage
double menton double vitrage
rembourrage c’est du rembourrage

Tristram renégat nébulé

comment t’es aliéné
mort avant la fin du monde
tous les jours de l’année
Tu prépares ton retour gorgé
t’es pas prêt à faire
tes découvertes
et ta nouvelle Angleterre

Au moyen-âge moyen-âge
tu as ton espace
la vie moderne vanessa
n’a pas sa place consuétudinaire
Le batârd et sa gangue
et les faux avis de passage
rembourrage c’est du rembourrage

Tristram renégat nébulé
tu n’es pas encore né
perdu sur la rotonde
on parlera alors de novlangue
comme un glaire dans la gorge
les faux avis de passage
double menton double vitrage
rembourrage c’est du rembourrage

Le 30/11/2020 Lu :
Les saisons, Maurice Pons : c’est facile, c’est une sculpture ou un spectacle avec de la pluie.
Lis : La zone du Dehors, Alain Damasio.
Relis : Les détectives sauvages de Roberto Bolaño.

Elle pond des milliers d’œufs ou d’œuvres

D’abord, un peu de rhétorique, une rhétorique de la narration, que d’autant appellent storytelling. Dans le très beau roman de Roberto Bolaño Les détectives sauvages se trouve une fable. Bolaño a écrit à propos Des détectives sauvages qu’on peut lire son roman comme une agonie ou comme un jeu (2). Cette fable, donc, est un récit autonome caché entre celui d’un fou et celui d’un poète quelque peu sénile. J’en vais en faire ici un résumé, en essayant de ne pas la dénaturer. C’est l’histoire d’Andrés Ramirez, un Chilien qui fuit sa patrie en 1975 dans les cales du cargo Napoli. Il arrive à Barcelone avec tout ce qu’il possède sur le dos, plus dix dollars qu’il garde dans l’une de ses chaussettes. Il trouve rapidement du travail dans en cuisine et un endroit pour dormir. Pendant qu’il va de la pension au travail, il lui arrive quelque chose, dans sa tête, il y a des nombres qui dansent. D’abord le 1, ensuite le 0, ensuite le 1, puis encore le 1, ensuite le 0, ensuite un autre 0, ensuite retour au 1, et ainsi de suite. C’est peut-être dû au changement d’environnement, se dit Andrés, ou aux nerfs. Un après-midi, un camarade de cuisine lui donne une grille de paris sur les résultats des matchs de foot. Il fait la relation entre les nombres, la grille de paris et ses déambulations Barcelonaises. Un kiosque ouvert, 0, un arbre, 1, deux types éméchés, 2, ainsi de suite jusqu’à avoir complété la grille. Trois jours après, il est l’un des neuf gagnants de la grille à quatorze résultats. L’idée de rentré au pays fortuné lui trotta dans la tête un instant, mais il reste en Espagne et passe de l’état de sans-papiers à celui d’un individu ayant un permis de séjour de trois mois. Il réfléchit à ce qu’il doit faire, à ce qu’il veut faire et se rend à l’évidence, ce qu’il veut faire, c’est irrationnellement gagner un autre loto sportif. Viennent alors des journées de doute à la recherche des nombres. Il parcourt les rues, note les numéros de portes, essaye de jouer aux dés et reste couché au lit. Ses ressources s’amenuisent, il dépense la moitié de ses précédents gains et pense devenir fou. Mais un matin, les nombres reviennent et il remplit trois grilles de loto sportif et deux billets de loterie. Cette fois-ci, il ne se passe rien. Mais la semaine suivante, il essaye de nouveau et remporte quinze millions. Du jour au lendemain, il se retrouve avec plus d’argent qu’il n’en a jamais rêvé, il achète un bar et fait venir sa mère et sa sœur. Il achète un grand appartement et un salon de coiffure pour sa sœur. Mais il continu de penser aux nombres, les nombres lui manquent et cela lui fait peur, il lui manque une finalité. C’est alors qu’il fait un rêve et qu’il se met à lire sans mesure, sans le plus petit soupçon de pitié pour lui et pour ses yeux, tous types de livres, en partant des biographies historiques, ses préférés, et en finissant par des livres d’occultisme ou des poèmes de Neruda, nous raconte Roberto Bolaño. Le rêve est très simple, en réalité plutôt qu’un rêve, ça a été des paroles, des paroles qu’il entendait dans son rêve : elle pond des milliers d’œufs. Il se met à lire les philosophes grecs et finit par pensait, que sa chance se trouvait dans un des œufs, abrité quelque part dans la caverne de Platon. Et qu’il ne comprendra jamais la nature de sa chance. Il se met alors à lire, sans répit. Cette histoire a retenu mon attention et entrera, s’intègrera, probablement, d’une façon ou d’une autre, dans mon travail. Revenons un instant sur la narration. Dans ce schéma actanciel, le héros, Andrés, fuit la misère et part en quête d’une vie meilleure, la réussite sociale est son objet de valeur. Il n’y a pas d’opposants dans le sens entendu, pas directement, si ce n’est la rudesse de la vie elle-même et son désir de comprendre la chance qu’il lui a souri, la voix des nombres, celle qui dit aussi elle pond des milliers d’œufs. Il reste une inconnue et une place à lui attribuer, celle de l’alliée. L’alliée, c’est la littérature, et je dirais plus encore, la lecture. Pourquoi ce texte me saute-t’il aux yeux, à la gorge ? Pourquoi cette phrase, elle pond des milliers d’œufs, me sollicite en tant que lecteur, en tant qu’artiste (3) ?
Suis-je une sorte de génie non-créatif ? Un spécialiste du pot-pourri ? Suis-je la bonne personne pour vous lire le texte de cette conférence ?

2 Bolaño, Roberto, ENTRE PARENTHESES, Essais, articles et discours (1998-2003), Édition d’Ignacio Echevarria, Traduit de l’espagnol (Chili) par Roberto Amutio, CHRISTIAN BOURGOIS ÉDITEUR, p.427.
3 cf : La seconde main

Suprématie totale de la création, 2020
Animation présentée pendant la conférence.