David
Ryan

06.11.2023

1992

Autoportrait au canard, 1992
Huile sur toile, 2,70 m x 1,90 m
Collection privée, Paris

Autoportrait au canard, 1992
Huile sur toile, 2,70 m x 1,90 m
Collection privée, Paris

Sako et Abou, 1992
Huile sur toile, 1,84 m x 1,49 m
Collection Frac Ile de France

Sako et Abou, 1992
Huile sur toile, 1,84 m x 1,49 m
Collection Frac Ile de France

Il y a deux types d’artistes : ceux qui croient qu’il est indispensable d’être en accord avec son époque et ceux qui ne s’en soucient pas une seconde. Ces derniers sont persuadés qu’ils portent avec eux, et jusque dans la moindre de leur action, une réalité qui n’a rien de commun avec les contingences de l’année 1994. Pour eux, une œuvre peut très bien se présenter sous la forme d’une enluminure, d’une sculpture en ivoire, d’un ready-made ou même d’une peinture, ils savent que la marque si recherchée de leur temps s’y retrouve aussi sûrement et peut-être même plus certainement que sur un CD Rom, mais qu’elle y est, heureusement, malgré eux.

David Ryan fait partie de cette catégorie indifférente, asociale par nécessité, vaguement indignée de n’être pas mieux admirée, et secrètement ravie de poursuivre une peinture capable de faire perdre son hoquet à une critique d’art qui se serait égarée dans ses très rares expositions.

Voici plus de dix ans qu’il peint avec l’idée de faire de la peinture un instrument de recherche capable de mettre en évidence des sensations, des sentiments et des souvenirs que ni lui ni personne n’avait jamais sincèrement ressentis. II dissimule sous des formes éprouvées des concepts inattendus, aussi crus que dans une pièce de Racine, mais limité tout entier à la lumière qui tombe sur ses figures avec toute l’arrogance d’un destin. La figure humaine l’intéresse comme une poire sur une assiette. II ne conçoit pas qu’elle puisse y rester sans rien faire ou rien ressentir. Elle collabore à des scènes où le fin mot semble être le déclin ou l’automne de la conscience. On y voit les figures regarder par en dessous, comme chez Eric Fischl, mais sans qu’elles aient besoin de dissimuler leurs vêtements. Leur humanité reste imaginaire, prise dans des sentiments qui ne sont pas encore de saison.

Fabrice Hergott, texte paru en 1994, dans le catalogue de l’exposition Figures et Paysages d’Yves Michaud.