Julie Bonnaud
& Fabien Leplae

11.07.2023

Dessins Extimes

Maison Salvan, Labège, 2021
Une exposition collective conçue par Stefania Meazza, coordinatrice de Documents
d'artistes Occitanie, et par Paul de Sorbier, responsable de la Maison Salvan.
En partenariat avec le Réseau document d'artistes.

Avec : Fabienne Ballandras, Julie Bonnaud et Fabien Leplae, Valérie du Chéné, Grégory Cuquel, Laurie-Anne Estaque, Rémi Groussin, Camille Lavaud, Céline Marin, Pascal Navarro, Karine Rougier, Sylvie Sauvageon, Myriam Omar Awadi, Thomas Tudoux.

Construire un feu // Arroser les plantes, 2020-2021
Structure de 240 x 240 cm, profondeur 120 cm,
polycarbonate, aluminium, acier galvanisé, roulettes avec freins, bassins aquatiques, pompe à eau, pompe à air, leds horticoles, rallonge, multiprises, minuteur, végétaux

Narcisse#4, 2021
aquarelle sur papier (paper-board : papier, carton bois et aluminium), 70 x 120 cm

Narcisse - Mue - Niger brillant, 2018
fusain et mine graphite sur papier, 144 x 175,5 cm

Photo : Damien Aspe, 2021

En réponse à une proposition du Réseau document d’artistes, dans le cadre d’un projet SET UP, tout a commencé par des territoires traversés, des rencontres avec des artistes, des découvertes d’ateliers, des compréhensions de contextes et de réalités avec lesquels composent ceux qui créent. À Felletin, Nice, Brest, Lyon, Boucau, Coustouge et bien ailleurs, il s’agissait, dans une époque de confinement, « d’aller vers » pour construire une exposition qui glane dans les différents fonds Documents d’artistes.
Le dessin a été retenu pour construire une exposition réunissant quatorze artistes, qui, pour la plupart, le pratiquent quotidiennement et en font leur medium principal. Pour ce projet, le médium graphique est appréhendé de manière ouverte, selon différentes approches, divers formats. Sans prétendre à l’exhaustivité, ni tenter de caractériser des tendances, l’exposition cherche à faire se rencontrer toutes les libertés qu’offrent, a priori, les contraintes de l’espace de la feuille de papier, préalable à tout. Elle se veut jubilatoire, polysémique et joue de l’environnement d’exposition atypique que compose la Maison Salvan.
Le titre « Dessins Extimes » renvoie au paradoxe d’une pratique menée principalement dans une grande intimité, dans le calme et dans des lieux possiblement restreints, mais qui, néanmoins, se destine à être vue et à échapper à celui qui aura créé. Il souligne aussi la manière dont a été conçue l’exposition : au plus proche des artistes dans leur situation de création et, d’une certaine façon, au plus loin du public ; avec cependant toujours à l’esprit que c’est à lui que l’on s’adresse.

   ” C’est dans leur atelier-logement à Rennes que j’ai rencontré pour la première fois le travail de Julie Bonnaud et Fabien Leplae, après une longue fréquentation virtuelle faite de reproductions et discussions.
    Pour tous les artistes, l’atelier est, comme le disait Daniel Buren en 1979*1, le « premier cadre de l’oeuvre » et un « lieu d’expérience ». Cela est d’autant plus vrai pour Julie Bonnaud et Fabien Leplae, dont le travail a été façonné par la pratique de ce lieu et les transformations s’y déroulant. Le monde végétal, élément prépondérant de leur environnement quotidien (quelle admiration - légèrement colorée de jalousie - ont toujours suscité leur plantes luxuriantes jonchant les murs de leur atelier!), revient sans cesse dans les dessins et tient un rôle de protagoniste dans leur iconographie.
    Il s’hybride avec des éléments anthropomorphes (une paire de gants à la surface luisante telle une mue de serpent) et technologiques (le drawbot, que les artistes utilisent en tant qu’outil de travail, à coté du dessin manuel, depuis 2014). Ce continuum entre végétal, humain et technologique est synthétisé par le mobilier de dessin, conçu avec l’aide d’un designer et destiné uniquement à l’atelier, ensuite adopté comme lieu de cohabitation entre les différentes pratiques, dessin et jardinage principalement, et pour la première fois, dans le cadre de cette invitation à la Maison Salvan, dispositif de monstration.
    Ce n’est pas tant l’idée de métamorphose qui sous-tend la pratique du duo d’artistes bretons, que celle de cohabitation, selon une sensibilité beaucoup plus contemporaine.
    On pourrait être tentés d’identifier dans le lien entre la main de l’artiste et la machine à dessiner, une filiation avec la thématique de l’homme-machine qui va du futuriste Filippo Tommaso Marinetti à Blade Runner en passant par Stelarc ou Vera Molnar - par ailleurs, la date de sortie de Blade Runner précède de quelques années la naissance de Julie Bonnaud et Fabien Leplae.
    Au contraire, il s’agit d’une approche au vivant que l’on pourrait définir holistique, où l’artiste se place dans ce flux, sans velléités de domination, et son activité s’apparente à une forme de collaboration avec le réel, dans la lignée de la pensée d’Henri Thoreau (Walden) et de Gilles Clément (le Tiers Paysage). “

1. Daniel Buren, Fonction de l’atelier, 1979.

Stefania Meazza, 2021