Synthèse
Bois, plombs typographique, cire d’abeille, feuille de chêne, cuivre D’après une nouvelle du recueil Aleph de Jorge Luis Borges, L’écriture du dieu.
Cette œuvre a été réalisée dans le cadre d’une résidence au domaine de Kerguéhennec durant l’automne 2012.
À l’aide d’une tablette d’écriture construite en bois, cordelettes et cire d’abeille, des plombs de typographie sont utilisés pour imprimer en creux les feuilles de chêne. Toute la nouvelle de Luis Borges est réinscrite lettre après lettre, ponctuée sur la surface végétale. Chaque lettre laisse aussi son empreinte dans la mince couche de cire d’abeille qui recouvre la tablette. Toute l’histoire y est potentiellement lisible, encodée par le geste aléatoire de l’écriture.
L’histoire vire au vent avant de disparaître à l’automne. Le projet questionne l’expérience du langage et invoque le personnage de la narration, prisonnier cherchant une formule secrète inscrite au cœur des choses du monde.
Réitéré en 2017, quelques feuilles ont été prélevées pour en faire un herbier, Mis sous presse à l’intérieur du recueil de nouvelles dans un mouvement cyclique, les mots infusent avec les mots. Présentée en envisageant le mur comme une page du livre, les feuilles sont disposées sur le mur à leur place dans le texte. La désorganisation apparente est en réalité le texte moins la réserve blanche laissée au texte manquant.
« […] il écrivit le premier jour de la création une sentence magique capable de conjurer tous ces maux. Il l’écrivit de telle sorte qu’elle parvienne aux générations les plus éloignées et que le hasard ne puisse l’altérer. Personne ne sait où il l’écrivit ni avec quelles lettres, mais nous ne doutons pas qu’elle subsiste quelque part, secrète, et qu’un élu un jour ne doive la lire. Je réfléchis alors que nous nous trouvions, comme toujours à la fin des temps et que ma condition de dernier prêtre du dieu me donnerait peut-être le privilège de déchiffrer cette écriture. Le fait que les murs d’une prison m’entouraient ne m’interdisait pas cette espérance.»
Jorge Luis Borges, L’écriture du dieu dans L’Aleph