Jean-Yves
Brélivet

12.10.2022

Cure de Jouvence

Exposition Cure de jouvence, jardin du prebystère , dans le cadre du 15ème festival "Grand écart" de Saint-Briac-Sur-Mer, en partenariat avec le Frac Bretagne.

Signe de ralliement, 2010

Sculptures en résine polyester et fibres de verre.
Photo : Michael Kern pour toutes les vues

Coq canon, 2010

Hommage aux poissons pierre, 2010

Détails
Les Jardins de curé touchent le ciel

Au siècle dernier, chaque paroisse avait son curé, le jardin allait de pair avec le presbytère. Aujourd’hui, sauf exception, ces lieux vivent une autre vie, la pelouse qu’ils détestaient les envahit. A vocation d’abord utilitaire, les légumes, les fleurs et les plantes médicinales faisaient bon ménage. C’était donc un jardin pour se nourrir, pour décorer l’église, pour se soigner au milieu duquel se trouvait un puits ou un bassin qui attirait les oiseaux. Toujours clos, une vigne circulait sur le mur d’enceinte produisant le vin de messe. Bien en évidence, une statue de la vierge attendait les prières.

Le point d’eau aux oiseaux, entouré de fleurs apportait une touche paradisiaque qui rapprochait de Dieu.

L’ambiance provenait d’une nature maîtrisée, capable de fouillis si nécessaire. Dans cet espace de silence aux activités vitales, la spiritualité planait d’autant plus que la religion sublimait l’atmosphère.

Même sous le contrôle de Dieu, la malédiction pouvait frapper. La barbe de Jupiter, le désespoir du peintre, le buis composaient les bordures végétales tout en protégeant de la foudre. Rameaux à bénir, le buis, symbole d’éternité, faisait partie des incontournables.

Les fleurs à l’honneur, donnaient une odeur de tableaux impressionnistes. Chaque fête religieuse a sa favorite du chrysanthème à la Toussaint au lys blanc de l’Ascension.

Toutes ces gerbes allumaient un feu d’artifice. Les fleurs stimulent l’œil, réchauffent le cœur,

elles nous regardent exaltant la pureté et l’amour.

En baptisant pieusement de nombreuses plantes, les hommes d’église s’appliquèrent à évangéliser le jardin. L’angélique (la racine du Saint Esprit), le myosotis (les yeux du Bon Dieu) ou la primevère (l’herbe de st Pierre), quelques exemples parmi des dizaines.

Sur toutes les parties du corps de la vierge, une fleur se penche. La dicentra (le cœur de Marie) le chardon Marie (le lait de Notre - Dame) le muguet (les larmes de Notre - Dame) etc. Les fruitiers suivaient l’exemple, avec en tête : les poires « bon chrétien ».

A Saint - Briac, lors d’une marée exceptionnelle, quatre maquereaux se sont accrochés au mur de l’église. Bonne pioche pour déguster les groseilles dont ils raffolent.

Ce lieu enchanté, propice à la méditation donnait un avant-goût du jardin d’Eden.

La même fée surveille le jardin d’Eden et le pays des merveilles. Alors que la présence divine transforme la contemplation en rêve, tout se joue à coup de baguette magique.
J-Y.B.

Série photographique Action : Ecoutons le souffleur de vers.
Prises de vue de Michael Kern
Œuvres présentées dans le cadre de l'exposition Cure de Jouvence, Saint-Briac-sur-mer, 2010

Action : Le souffleur de vers. (Appel à la population)

Toute notre vie, nous côtoyons, nous fréquentons, successivement, divers univers. Ce sont les mondes du travail, de la famille, des loisirs, de la religion, etc.

Aujourd’hui, je vous propose de fréquenter celui de l’art.

L’art est un mot à tiroirs où des mouvements inter réactifs se sont succédés. Le symbolisme, le fauvisme, le surréalisme, une dizaine de noms se terminant en « isme » participent à l’histoire de l’art du 20éme siècle.

Les mouvements mettant l’image en avant retiennent vraiment mon attention.

On dit sage comme une image, mais l’arrogance et le mordant peuvent aussi les habiter.

L’oiseau présenté ici est une image, un concentré de nature jouant l’ambassadeur. Objet de méditation, il se conduit en alchimiste. Il ne transforme pas le plomb en or mais l’air en chanson. Il adore les refrains où la poésie surgit. Un peu de poésie dans ce monde terni pense-t-il ? Grands voyageurs célestes, squatteurs d’arbres, par leurs chants ils prennent la parole, leurs mélodies d’amour dévorent le frein du quotidien. Certains fréquentent la ville, d’autres les jardins, la forêt ou la mer. Leurs ailes dessinent dans les airs des accents circonflexes, ils peignent l’espace à leur manière par petites touches.

Alors que l’on parle du divorce de l’homme et de la nature, loin des romances apocalyptiques, il pousse son petit couplet en toute lucidité nous invitant à l’accompagner histoire d’avoir du coffre. Exaltons l’atmosphère, ce coffre - fort aux courants d’air ne doit pas virer en poudrière.

Dans la notion de poésie, il ne s’agit pas de proclamer des poèmes, mais tout simplement d’admirer les paysages sans algues vertes ou les arbres debout loin des cyclones bercés par les abeilles.

L’oiseau est un trait d’union entre la terre et le ciel. Il nous fait décoller vers le rêve, avec lui nous touchons les nuages.

Touchons les nuages, sans oublier l’acte citoyen, la nature entre les mains.

Cet objet baptisé « Souffleur de vers » est un poumon, une bouffée d’oxygène.

Il est bien connu que l’abus d’oxygène mène à l’euphorie.

Au-delà du sourire qu’il engendre, que ces photos témoignent de votre souci d’une nature authentique trop souvent asticotée à rebrousse poils, déplumée à la sauvette.

Tout comme l’oiseau, l’arbre est un lien entre la terre et le ciel.

Par ses racines tentaculaires, il pénètre le mystère des profondeurs, par ses branches, il embrasse le cosmos. Source de vie, symbole d’éternité, l’humanité le vénère. Sa capacité à renaître au fil des saisons, sa force protectrice et nourricière en font l’incarnation par excellence du sacré.

En plaçant l’arbre, « Hommage aux poissons pierres » dans l’église, le mur d’enceinte aux maquereaux déroule sa farandole. Tous ces poissons dansent de concert, ils nous rappellent que la vie a d’abord habité la mer avant d’envahir la terre. Nous sommes des poissons sur pattes, avides, toujours prêt à abuser de pommes.

Les arbres de Jesse s’accrochent aux tympans et aux chapiteaux, celui ci par filiation les salut.
J-Y.B.