Poussé par une envie constante d’expérimenter, l’artiste imagine toutes sortes de sculptures, d’objets et d’installations qui marient, de manière souvent approximative, des éléments aussi hétérogènes qu’instables et informes. Chez ce dernier, il est toujours question de changements d’états ou de capillarité et chacune de ses productions affiche une dynamique d’indétermination perpétuelle. (…) Animant sa production dans ses dimensions tant théoriques que formelles, ce principe de capillarité soutient une logique de métamorphose qui, de manière récurrente, caractérise l’approche sculpturale de Francis Raynaud. On pense ainsi à l’éponge, au sucre ou au beurre – fréquemment utilisés dans la […]
Poussé par une envie constante d’expérimenter, l’artiste imagine toutes sortes de sculptures, d’objets et d’installations qui marient, de manière souvent approximative, des éléments aussi hétérogènes qu’instables et informes. Chez ce dernier, il est toujours question de changements d’états ou de capillarité et chacune de ses productions affiche une dynamique d’indétermination perpétuelle.
(…) Animant sa production dans ses dimensions tant théoriques que formelles, ce principe de capillarité soutient une logique de métamorphose qui, de manière récurrente, caractérise l’approche sculpturale de Francis Raynaud. On pense ainsi à l’éponge, au sucre ou au beurre – fréquemment utilisés dans la composition de ses objets -, des éléments instables dont le devenir informe contamine leur environnement d’un sursaut d’aléatoire. Il y a une dynamique perpétuelle d’indétermination dans cette manière de faire de la sculpture, et sa finalité critique ne semble pas tant être dirigée contre l’institution que vers le spectateur, invité à partager une expérience intrusive et dégénérescente de la matière. Le parallèle avec la fonction métabolique du corps n’a ici rien d’anodin pour cet artiste ayant reçu une formation de cuisinier ; on pourrait même se demander si le corps, chez lui, ne constitue pas le support ultime de l’œuvre, dans une pratique inversée de l’art corporel. Ses expositions s’adressent ainsi non seulement aux sens, mais suggèrent une forme altérée de perception, laquelle s’incarne dans cette référence répétée à l’alcool, circulant à la surface des pièces où il s’infiltre comme dans les organes du public-consommateur. Dans cette familiarité confuse qui unit les œuvres et le public, les changements d’états exacerbent les phénomènes d’étrangeté, conduisent à l’impossible définition de la profonde nature des choses.
Extrait du texte Toujours trouble, Franck Balland, 2016