Catherine
Rannou

21.11.2022

Hors réseaux / Arctique

 2011

Série 1

Hors Réseaux Arctique, 2011
Ile d’Igloolik, tirages numériques 205/75cm sur papier barité
(d’après sténopé en impression directe sur papier cibachrome)

série réalisée grâce à l’aide à la création de la DRAC et du Conseil Général du Finistère, aide à la mobilité des artistes de la Région Bretagne et de l’Institut Français avec le soutien logistique de l’Institut Polaire Paul Emile Victor (IPEV Brest) et l’association Artcirq (Canada).

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Ce projet se développe depuis 2011 autour de la représentation sur une même image du mouvement visible ou invisible situé dans un lieu hors réseaux.

La première expérience s’est effectuée lors d’une marche (Nunaqpa) de plusieurs semaines effectuée avec des familles héritières d’une tradition nomade et chamanique en Artique.

J’étais au départ accaparée par la question technique, liée à l’absence de réseau (routier, électrique et internet), remettant en question mes médiums habituels (vidéo, mise en ligne de documents en temps réels). Il a fallu inventer ou retrouver d’autres modes de captation. Le dessin ne me suffisant pas pour retranscrire l’étrangeté de la marche loin de tout réseau.

Ce sont des recherches autour de l’auto-construction d’appareils de prise de vue sans cellules ou batteries qui m’a conduite à la « camera obscura »

J’ai construit plusieurs camera obscura pour réaliser des sténopés, celle retenue permet d’avoir un format panoramique avec une forte profondeur de champ. Son format est lié à la dimension d’une demi-feuille de papier cibachrome Ilford (papier positif couleur de 4/10 pouces, destiné à une exposition à la lumière artificielle).

Entre temps ce papier a arrêté d’être produit, et j’utilise depuis des stocks de papiers périmés trouvés dans le monde.

Une table de calcul le «Black Cat » me permet en fonction de l’observation attentive de la situation photographiée et des qualités de lumière, de régler le temps de pause. Le papier couleur positif a une sensibilité très basse et nécessite des temps de pause longs allant de 7 à 25 minutes, le temps des vidéos que je réalise habituellement.

Ces photos-films « enregistrent » des mouvements longs. Les mouvements rapides s’effacent de l’image, ne s’y impriment pas. C’est le mouvement lent et répétitif des hommes, des animaux ou des plantes qui apparait, ou la fixité d’un paysage. En revanche les éclats et changement rapides de lumière « perforent » l’image et la contraste.

Un manchon opaque et des sacs étanches permettent à chaque prise de vue de changer le papier du boitier sans l’exposer à la lumière. Chaque manipulation de prise de vue prend en moyenne 30 mn, le temps d’observer, de discuter, ou de choisir la prochaine prise.

Ce projet a également réactivé un réseau technique artisanal autour du développement des photos cibachrome, de la trouvaille des dernières machines Ilford et produits permettant le développement au savoir faire d’ une ancienne tireuse photo professionnelle qui maintenant s’est convertie dans la vidéo et le film documentaire.

Je développe les tirages originaux positifs (10/25cm) artisanalement puis les faits scanner et imprimés numériquement au format 205/75cm par un professionnel. Seules les parties fantomatiques sont légèrement contrastées, les poussières et autres accrocs liés à la rusticité de la prise de vue originale et de son tirage sont conservés.