Bruno
Peinado

22.05.2017

Il faut reconstruire l'Hacienda, ou comment moins par moins est égal à plus


Œuvre pérenne. 30 panneaux, techniques mixtes.
Œuvre in situ, collection Mrac Occitanie / Pyrénées-Méditerranée, 2016.
Photo : Aurélien Mole

L’invitation faite à Bruno Peinado d’intervenir sur la façade est directement liée au projet de l’extension, située dans le bâtiment adjacent au musée existant, au premier étage de la Poste qui reste en fonctionnement.

Le projet s’inspire de l’imaginaire de l’Hacienda, texte manifeste situationniste écrit dans les années 50 qui donnera son nom dans les années 80 à une boîte de nuit mythique de Manchester. L’Haçienda est un projet utopique porté par le label Factory Records qui donna naissance à toute la scène House anglaise et favorisa la rencontre et les collaborations entre musiciens, plasticiens et graphistes, tous nourris de la pensée des avant-gardes artistiques qu’ils réinterprètent. Ce lien entre les avant-gardes et la façon dont elles ont été réinvesties par la culture populaire dans le champ de la communication, du design et de la publicité est au coeur de la proposition de l’artiste. Sur cette base, le projet pour la façade consiste en deux gestes forts. Le premier geste lie symboliquement les deux bâtiments, l’ancien et l’extension, en empruntant la couleur grise des plaques de granit du musée existant pour l’appliquer sur la totalité du bâtiment de l’extension. La couleur grise est une récurrence dans le vocabulaire plastique de l’artiste, la couleur du métissage. Ici, elle a également pour fonction de jouer d’effets de contrastes avec les enseignes colorées. Le second geste permet de faire dialoguer la forte présence d’enseignes publicitaires et de signalétiques, notamment sur le bâtiment qui abrite la Poste mais plus largement dans le sud de la France, avec un imaginaire lié à l’art abstrait et aux avant-gardes artistiques que la collection du musée convoque. L’intervention de Peinado se compose d’une série de panneaux et d’enseignes libérés de tout contenu publicitaire et ramenés à leur proximité visuelle avec des tableaux abstraits. Chaque panneau et enseigne, produit avec les techniques et les matériaux de la signalétique (panneaux luminescents, caissons lumineux rétro-éclairés, panneaux trivision, etc.), tisse un lien avec l’histoire de l’art en général et avec la collection du Mrac en particulier, offrant pour le visiteur, dès l’espace public, un musée à ciel ouvert. Telle enseigne évoque le design de la boîte de nuit de l’Haçienda, telle autre le célèbre tableau de Matisse, Porte-fenêtre à Collioure (1914), telle autre le Pop Art, telle autre enfin fait un clin d’oeil aux monochromes d’Olivier Mosset. Mais toutes ont en commun de revisiter la question de la couleur sur un support, introduisant également un jeu avec l’oeuvre de Daniel Buren sur la façade existante.