Gabrielle
Manglou

10.10.2023

Délicatolitho

Vues de l’exposition au CAP Saint-Fons, Lyon, 2021
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Vues de l'exposition Délicatolitho au CAP Saint-Fons, Lyon, 2021
Photos : David Desaleux

Volet sonore d'un travail élaboré pour l'exposition Delicatolitho.
Musique & sons : CORE duo artistique composé de Fabrice Laureau & Gabrielle Manglou
Effets, enregistrement & mixage : Fabrice Laureau

La voix des pierres 1, 2021
Tissu, bois, pierres, ficelle de lin
dimension variable

Les montagnes 3, 2021
Bois, graphite, pierres, ficelle de lin

La voix des pierres 3, 2021
Micro sculpture sur socle
Bois, pierres, laiton, ficelle de lin

Les montagnes 6, 2021
Graphite & encre sur papier

L’inventaire, 2021
Pierres, ficelle de lin, pâte de graphite, encres, tissus

Vues de l'exposition Délicatolitho au CAP Saint-Fons, Lyon, 2021
Photos : CAP Saint-Fons, Lyon

© Adagp, Paris

Delicatolitho est un titre qui se lit comme une mélodie, un écho à la partition - fil rouge de l’exposition - composée pour l’occasion en collaboration avec F/LOR (Fabrice Laureau) compositeur et musicien multi-instrumentaliste. Le delicato, emprunté au lexique de la musique renvoie à la légèreté tandis que litho, renvoie à l’étymologie du mot « pierre », comme dans lithophones qui désigne les instruments préhistoriques constitués de pierres sonores.

Souvent chez l’artiste, le titre résulte du rapprochement de deux termes, de mondes - à l’apparence - éloignés. Et c’est précisément dans la rencontre des opposés qui se creuse le travail de Gabrielle Manglou ; la densité de la pierre et la légèreté du son, le vide et le plein, le fragment et l’ensemble - l’individuel et l’universel, le pli et la ligne.
Le caillou est un motif, un mot, une note. Le fragment d’un ensemble ; une pierre, une île ou une montagne. Capsules temporelles, mémoire du temps de la nature et du temps de l’homme, entre existence et résistance. Ce sont des fossiles du temps, des photographies de la mémoire mais aussi des fragments d’un ensemble plus vaste.

La rencontre de deux pierres produit un son, l’unité de base de la pièce sonore à la base de l’exposition. Le projet de l’artiste est un rappel de ces gestes simples mais universels, comme celui de ramasser des cailloux, un appel à l’émerveillement qui nous renvoie à notre infimité face à l’infini du cosmos.

Dans le cadre de cette exposition monographique, l’artiste présente un répertoire d’objets « hybrides » comme elle aime les définir. L’objet est central tant dans sa pratique, que dans le déploiement de sa pensée où se croisent dans un rapport syncrétique cultures, rites ou formes empruntées à la nature. Geste, pensée et objet; tout est imbriqué dans le travail Gabrielle Manglou qui explore en rhizome (par association ou dissociation) le geste et son intelligence propre.

Dans l’exposition au CAP Saint- Fons on retrouve également des formes qui habitent son univers artistique ; le pli, la ligne, la trame, comme dans un maillage. Il y a des formes qui mettent en mouvement la pensée, nous rappelle l’artiste, car elles cachent des dimensions philosophiques, existentielles ou métaphoriques. « Et les individus, comme les objets, ne sont pas de choses fermées mais un entrecroisement de lignes, à la manière d’un tissu. »1
Entre assemblage, accumulation et transformation de la matière, Gabrielle Manglou déploie une taxonomie d’objets, de dessins et de sculptures/coutures qui correspondent à autant de gestes condensés dans son répertoire formel : plier -déplier, creuser-remplir, couvrir-révéler.

L’artiste nous invite à prendre part à une sorte d’archéologie inversée à l’instar des chercheurs qui considèrent que les pierres ne sont que la partie émergée d’un monde cachée qu’il faut montrer, faire apparaitre, révéler.

Alessandra Prandin - Directrice du CAP

  1. Tim Ingold, Une brève histoire de lignes, Zones sensibles, 2011