Charlotte
Vitaioli

06.11.2023

Dessiner les tropiques

Vues de la restitution de résidence à 2angles, Flers avec Joachim Monvoisin, 2016

Voir les Bateaux qui Chavirent, 2016
Peinture sur soie, 240 cm x 280 cm
Vues de la restitution de résidence à 2 angles,
Flers avec Joachim Monvoisin, 2016

Chiava, 2016
Peinture acrylique sur feutrine, rafia, 15 cm x 100 cm
Avec des oeuvres de Joachim Monvoisin
Masque en terre et peinture à huile sur bois

Vue d'ensemble dans l'espace du 2angles, 2016
Avec des oeuvres de Joachim Monvoisin. Masque en terre et peinture à huile sur bois
Production 2angles

Astrolabe, 2016
Feutrine, résine, 40 cm x 40 cm

Avant que la Nuit ne Tombe, 2016
Laine, feutre, bois,
140 cm x 80 cm

Avec des oeuvres de Joachim Monvoisin
Peinture à huile sur bois

Inuit, 2016
Laine, 40 cm x 20 cm
Production 2angles
Photos : Thomas Cartron

(…)

Gaël Charbau. : J’ai l’impression que le fait d’avoir entamé cette résidence sans idées préconçues vous a amené à envisager des thèmes assez universels comme la magie, le symbolisme, le chamanisme…

Charlotte Vitaioli : Oui. (…) Pour ma part je suis traversée par un certain nombre de références qui se brassent et s’entrecroisent. Les tragédie shakespeariennes m’inspirent des mises en scène. Chez Puvis de Chavanne et Henri Rivière je trouve une palette de couleurs. Le tableau « L’île des morts » d’Arnold Böcklin, ou le film « Santa Sangre » d’Alexandro Jodorowsky sont des œuvres que je regarde régulièrement avant de me mettre au travail.

A partir de cela, j’aime produire des objets qui seraient ceux d’une culture enfouie, les objets inventés d’un rituel, présentés comme des reliques, des objets processionnels.

J’imagine des formes énigmatiques, animée par l’envie de créer des grigris et des divinités contemporaines, ou la magie pourrait opérer par la forme tout comme les figures impossibles de Cornellius Escher.

Dans « Avant que la nuit ne tombe », épaisse broderie de 120x80cm, j’ai essayé d’introduire cette idée. Au centre de la composition, une forme en losange encadre un végétal exotique, qui pourrait être le symbole d’un rituel à ré-inventer… En arrière plan, l’on retrouve des couleurs qui se tiennent entre le jour et la nuit. J’essaie de capter cette mélancolie particulière.

Dans le folklore amérindien, les franges sont symbole des bienfaits du ciel qui tombent sur la terre. J’aime bien cette image.

Dans « Voir chavirer les bateaux », j’ai aussi eu envie de les utiliser pour attirer l’attention sur le caractère théâtral de la pièce. Ici, se rejoue une forme de mélancolie heureuse qui transparait par une représentation de l’eau, dont les vagues de bleu et les nuances de roses passées, rappellent l’heure bleue, l’été s’achevant ou la nostalgie de l’été indien.

Au Portugal, on parlerait de saudade, terme intraduisible évoquant une « épine amère et douce » selon Amalia Rodriguez. L’aspect mélodramatique, est appuyé par le titre de l’oeuvre, qui sont les mots désabusés de Baby Lou, chanson de Serge Gainsbourg.

Extrait de l’entretien croisé effectué avec Gaël Charbau pour le catalogue de l’exposition Dessiner Les Tropiques, 2angles, Relais Culturel de Normandie, 2016

© Charlotte Vitaioli, ADAGP, Paris